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C’est déjà un titre, ça
!
En fait, plus simplement, parlons un peu couleur,
et plus particulièrement, CRAYONS DE COULEUR.
Qui, passant un jour devant une boutique de fournitures
pour artistes, n’a pas rêvé sur ces somptueuses boites étalant
leurs dizaines de crayons de couleur en bois, bien alignés, comme
à la parade ? |
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Quand on les regarde ainsi, ces belles et inaccessibles
boites, rangées comme un arc-en-ciel, le monde paraît soudain
plus simple, plus ordonné, plus beau que ce qu’il n’est de l’autre
côté de la vitrine. Un monde de couleurs vives et franches,
d’où sont exclues toutes nuances, subtilités, ambiguïtés.
Un monde qui ressemble beaucoup à celui de l’enfance car, gamins,
qui n’a pas joué avec ces fameux crayons de couleur ? |
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Ah ! versons une larme sur ces trousses au cuir
fourbu où l’on glissait, dans les attaches prévues à
cet effet, nos crayons de couleur mâchonnés à la mine
usée. C’est qu’ils en avaient fait du chemin, ces bouts de crayon
! Des premiers gribouillis, jusqu’aux copies léchées de nos
héros favoris de BD, en passant par ces inévitables cartes
de géographie où, sur papier quadrillé, on affublait
les grands fleuves de France d’affluents incertains. |
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Et nos premiers croquis de maison ! Carrée
la maison, avec le toit rouge sang et la cheminée qui fume, le papa
dans le jardin qui tond une pelouse au vert criard et la maman sur le pas
de la porte avec une robe rouge comme le toit, le tout sous un ciel barbouillé
bleu et un soleil jaune plein de doigts. « Ce petit sera un artiste,
regarde comme il a dessiné le chien des voisins - C’est pas un chien,
c’est un dinosaure » Combien de parents ont accroché au mur
de leur bureau ces œuvres d’art ? Mais dans les musées, les vrais,
les officiels, avec leurs salles sombres et leurs portes à battants,
bien peu de dessins aux crayons de couleur, n’est-ce pas ? Et pourtant,
les Michel-Ange, les Fragonard, les Van Gogh, les Picasso, les Hergé
et autres huiles des Beaux-Arts en sont tous passés par là
: un simple trait de crayon de couleur sur un simple papier. |
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Bien sûr, avec des crayons de couleur,
il ne s’agit pas de rivaliser avec les « grandes machines »
artistiques. On ne refera pas le plafond de la Chapelle Sixtine au crayon
Conté® (bien que…), ni le Radeau de la Méduse ni la Joconde
(sauf pour les moustaches). Non, laissons aux génies l’huile, la
tempera, aquarelle, acrylique et autres nobles produits. Trois crayons
suffisent pour accéder au rêve ; car toute la beauté
du crayon de couleur est là : dans sa simplicité. Avec lui,
pas de chichi, pas d’atelier, pas de message. Un bout de papier et un coin
de table. Une fleur, un escargot, un bonhomme qui danse, un château
de conte de fée, le chien du voisin, le dinosaure du coin, tout
est bon pour le crayon. Et surtout, ne soyons pas sérieux, mais
légers, légers, comme le crayon léger, léger
sur le papier… |
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Prendre en main ces crayons si ronds qu’ils roulent,
c’est retrouver le parfum de l’enfance, le parfum du bois tendre et celui,
plus sec, comme la pierre, de la mine affûtée. On revoit les
devoirs sur la table de la cuisine, les genoux écorchés dans
la cour de recréation, les leçons de lecture dans la pénombre
d’un après-midi de juin bourdonnant de silence, les marelles et
les balles aux prisonniers et ce dessin, copié sur un livre de leçon
de choses, et qui montre l’intérieur clair et précis d’une
pomme coupée en deux avec ses deux pépins comme deux yeux. |
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C’est peut-être ça, le mystère
et le charme des crayons de couleur : ils ne sont pas entrés au
Musée car ils délimitent quelque part en nous, de leurs petits
poteaux droits et multiples, les paradis colorés de notre enfance. |
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Texte, photos et
dessins (aux crayons de couleur !) de Guy Robert - Avril 2005
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