Octobre 2007
Les autres N°





Mes maîtres reviennent de l’Ouest. De l’Ouest des USA. Bien entendu, je ne devais pas être du voyage. Mais si vous suivez régulièrement mes aventures, vous vous êtes sans doute aperçu que rien n’est impossible à un chien de BD. J’ai donc fait jouer mes relations et ai décroché un casting à la Hollywood Pictures Company. Si bien que moi, je ramène davantage que des souvenirs : un Press Book ! Mon Press Book ! Follow me, old chaps …


BRYCE CANYON
A l’origine, les Indiens voyaient dans ces rochers dressés des hommes debout et pour eux le lieu était donc sacré. Quand ils en furent chassés, de là comme d’ailleurs, la région fut cédée à un pionnier qui se nommait Ebenezer Bryce. Quand ce dernier découvrit le canyon il eut cette réflexion mémorable :
« Voilà un sacré coin pour y perdre une vache ! ».
Bon, tout le monde peut pas être poète. Mais en 1860, dans cette partie du continent, fallait d’abord avoir les pieds sur terre, avant de les compter pour faire des vers. En tout cas, ce cher Ebenezer a donné son nom au Canyon. C’est ça la gloire…
     Bryce Canyon au lever du soleil



LA DILIGENCE DE LA WELLS FARGO
Jusque dans les années 1960, les westerns étaient tournés dans les gorges du Nevada, et sur la dernière route non encore goudronnée avait lieu l’inévitable attaque de la diligence par les indiens ou de dangereux et recherchés 
outlaws. Un siècle auparavant (1860) la Wells Fargo & Co assurait ces voyages. Enfin, « assurer » est un bien grand mot ! Car à l’époque, de tels périples étaient longs, inconfortables et risqués. Ah ! Maintenant, la route est goudronnée, c’est plus tranquille, on mange moins de poussière et davantage de pop-corn, en regardant ces bons vieux films technicolor qui sentent encore la poudre.
      Reconstitution d'une diligence de la fin du XIXème siècle



MONUMENT VALLEY
Dans les années 40 du siècle dernier,un couple avait ouvert une auberge à Monument Valley. Il y invita un certain John Ford, cinéaste. Celui-ci tomba amoureux du lieu et y tourna ses meilleurs films :
« Fort Apache », « Rio Grande »… 
Ces images ont fait le tour du monde et les fameuses roches, énormes (200 m de haut), qui servent de décor aux westerns, sont connues de tous et font pratiquement partie de notre imaginaire. Elles portent des noms qui évoquent leur forme (Elephant Butte) ou rendent hommage à des pionniers chercheurs d’or tués par les indiens du coin au XIXème siècle (Mitchell Butte).

Le parc est géré par les indiens Navajos, actuellement la plus nombreuse tribu indienne d’Amérique. Ils y vivent d’élevage, d’artisanat et de tourisme, sur une superficie grande comme la Suisse. Mais plus de plumes ni de danse de la pluie, ni de scalp ! Les Navajos, en jean Lewis et chemise à carreaux, vont au supermarché dans leur 4x4 comme tout le monde et fiers d’être américains. Leur langue n’a-t-elle pas servi de code secret, indéchiffrable, durant la dernière guerre ?

Les indiens sont braves. Je dis ça, parce que là, il y en a un qui me regarde d’un œil sombre en tripotant son arc…
 

      Momunent Valley - vue sur les "mesas" depuis John Ford Point



LE GRAND CANYON DU COLORADO

En 1869, le Major John Wesley Powell explore par le fond, de fond en comble et non sans mal, cette merveille de la nature. A l’issue de cette épopée dangereuse et épuisante, il eut cette phrase : « Après moi, personne ne s’aventurera plus dans ces parages ». Comme quoi, on peut être courageux et génial et se tromper lourdement sur l’avenir. Avec 5 millions de visiteurs par an, le Grand Canyon est l’un des sites les plus visités au monde.

Faut dire que le « grand caniveau », comme l’appelait gentiment Robert Louis Stevenson (l’écossais qui écrivit l’Ile au Trésor, venu ici pour soigner sa tuberculose), est vertigineux. 25 km de large, 320 km de long, 1800 m de profondeur. Le Colorado, qui a mis 6 millions d’années à en creuser les gorges, serpente au fond et offre à l’amateur expérimenté l’ivresse de ses 160 rapides. Toute la géologie est contenue dans ses strates colorées et déchiquetées. La Nature a produit là quelque chose que les œuvres humaines peinent à égaler. D’ailleurs, les astronautes en orbite autour de la terre ne discernent que 2 choses à sa surface : La Grande Muraille de Chine et… Le Grand Canyon !
 

      Le Grand Canyon : d'ici à la rive d'en face il y a... 25 km !
 

LE GOLDEN GATE

Reliant les 2 rives de la Baie de San Francisco, le Golden Gate Bridge a été construit de 1933 à 1937. A l’époque, c’était le plus grand pont du monde. Sa fameuse couleur (orange international) a été choisie pour sa résistance aux intempéries, au soleil, et pour sa bonne visibilité dans le brouillard. Car du brouillard, il y en a souvent à San Francisco (mais pas sur la photo !), et ce n’est pas forcément dû à la fumée des herbes prohibées.
Tout est « cool » là-bas et je le suis devenu depuis que j’en suis revenu : je fume des os et j’ai repeint ma niche en bleu.

      Le Golden Gate Bridge : son tablier est à 78 m au-dessus des eaux de la baie.



 
Voilà, mon Press Book s’arrête ici. Ce fut un bien beau voyage et ces images n’en sont que le pâle reflet. J’ai décroché pas mal de contrats sur place et je vais sans doute tourner bientôt dans un western spaghetti : ça tombe bien, j’adore les pâtes ! Faut dire qu’ils raffolent de moi là-bas. La preuve, c’est que j’ai déjà mon étoile sur Hollywood Boulevard !


Photos de Claudine Robert - Texte et dessins de Guy Robert © 2007