Maman était poète. Oh, pas comme Verlaine, Victor Hugo
ou Prévert. Pas si sérieusement que ces poètes professionnels,
même si elle apportait tout son sérieux à cet exercice
qui consiste à mettre sa pensée en vers. Toute sa vie, en
toute circonstance et en tout lieu, elle a réservé chaque
jour quelques minutes (ou quelques heures, c'était selon) à
écrire. Elle en a rempli des cahiers d'écolier ! Car tout
était raison à poésie : un anniversaire, une fête,
un deuil, un rayon de soleil dans les arbres, le sourire d'un petit enfant
dans la rue, une nuit d'insomnie, une joie, une peine. Et les souvenirs…
Ses premiers vers sont ceux d'une adolescente en colère contre l'Occupation Allemande, en 1940 (elle avait alors 14 ans). Et la veille de sa disparition, à 79 ans, elle cherchait encore la rime, rassemblant, recopiant, corrigeant ses poèmes, ses "bêtises", comme elle disait. Elle écrivait à la main, ce qui ne se fait presque plus de nos jours, et si elle n'a pas connu les joies de l'édition, certains de ses poèmes ont été publiés dans "Le Morvandiau de Paris". La poésie, c'était juste pour son plaisir, et celui de sa famille (dont elle écrivit minutieusement l'histoire, en l'illustrant de photos et de dessins). Linutil, qu'elle a connu et qui est lui-même un chien poète
à ses heures, se devait de lui rendre hommage. Voici donc un poème
qu'elle composa en 1986 et retrouvé dans un de ses nombreux cahiers,
très représentatif de sa "manière" : sensible, nostalgique,
revivant et construisant le passé à jamais enfui comme peut
tenter de le faire... une photographie.
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C'est dans le fond du grenier Jeannine ROBERT
- Mars 1986
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