C'est
maintenant une coutume : l'automne venu, on fait provision d'images dans
les forêts nivernaises, quand d'autres cherchent des champignons
ou coupent du bois. Pas toujours facile, car il faut choisir le bon moment
: trop tôt, les feuilles sont encore vertes ; trop tard, elles sont
déjà tombées par terre, toutes marron. Il faut donc
opérer avant les premiers brouillards et les premières gelées,
avant les coups de vent, avant la pluie, sous un petit rayon de soleil…
Je vous le disais bien, l'automne a beau être un sujet immobile,
il n'en est pas moins délicat à saisir.
Mais
au fait, pourquoi les feuilles des arbres deviennent-elles jaunes ? La
biochimie nous donne la réponse : à l'approche de l'hiver,
la sève ne montant plus dans les branches, la chlorophylle verte
tend à disparaître des tissus de la feuille. Les cellules
jaunes, qui étaient présentes dans la feuille depuis leur
naissance, prennent alors le dessus et s'épanouissent sous nos yeux
étonnés. Les feuilles ne deviennent donc pas jaunes, elles
le sont déjà, mais on ne le découvre qu'à l'automne…
Etonnant ! Mais bon, vous me direz que ça ne change pas grand-chose…
Sauf pour les artistes peintres qui devront mettre du vert sur leur toile
avant de peindre les feuilles en jaune ; mais ceci est une autre histoire
qui ne regarde qu'eux. Pour l'heure, promenons nous dans les bois, au cœur
des lumières et des ombres, spectacle mouvant aux couleurs sans
cesse renouvelées.
Nous
voilà au centre du tableau où les lointains bleutés
font ressortir le jaune des arbres. Dans l'épais tapis de feuilles
tombées à terre, le pas du promeneur solitaire fait un bruit
de chuchotement.
Au-delà
de la forêt s'ouvre la Vallée Perdue. C'est sans doute dans
ces pâtures oubliées que paissaient, il y a quelques millions
d'années, les paisibles brontosaures.
Seuls
les oiseaux, descendants de ces lointains ancêtres dinosauriens,
sont maintenant maîtres des lieux. Nous, nous ne faisons que passer,
invités au splendide spectacle des incendies de l'automne.
Une
carte de la région éviterait-elle de vous perdre en parcourant
la vallée ? Pas si sûr, car en fait il s'agit ici non pas
d'une carte routière mais d'une macrophotographie de feuille d'automne
(du noisetier, pour tout dire). Et c'est tout un paysage miniaturisé
que l'on retrouve dans les nervures et les cellules de la feuille, suivant
l'adage que "tout est dans tout" … et inversement !
Un
peu plus loin, la lumière givre l'herbe. Il y a du Cézanne
et du Monet dans le flou des arrière-plans. On regrette alors de
ne pas savoir tenir un pinceau ou un stylo pour décrire tout cela.
C'est juré, la prochaine fois, on apprendra…
Ultime regard sur l'horizon. Un sapin, majestueux, nous rappelle que c'est bientôt Noël et que beaucoup de sapins de Noël viennent du Morvan. Mais celui-là aura quelque difficulté à s'introduire dans les salons parisiens. Laissons-le donc au bon air, sentinelle veillant sur la chute des dernières feuilles, lui qui ne les perd pas et en retire, à ce qui nous semble, une certaine fierté, justifiée ou non !
©
Linutil - novembre 2014 - Photos prises près de Menou et de Couloutre,
dans la Nièvre
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