C’est sur le chemin de la boulangerie,
un dimanche matin, que je l’ai trouvé : un sou en cuivre. Sur le
coup, j’ai cru reconnaître un bête centime d’euro perdu par
un passant. Mais non, en y regardant de plus près il s’agissait
de son ancêtre regretté et néanmoins sans valeur, le
bon vieux centime de franc. Hein ! Quel trésor, pas vrai ? J’étais
sur le point d’abandonner ma prodigieuse découverte au passant suivant
quand insidieusement cette petite pièce de rien du tout m’a ramené
au temps (lointain) de mon enfance.
De retour de faire ses courses, ma
maman me prêtait quelquefois une de ces grosses pièces de
monnaie qu’on appelait « ferraille » à l’époque.
Je posais une feuille de papier sur la pièce puis passais patiemment
et minutieusement un crayon de couleur sur la feuille. Le miracle s’opérait
alors : l’image de la pièce apparaissait peu à peu, comme
par magie. Je renouvelais le prodige plusieurs fois, dans toutes les couleurs
de l’arc-en-ciel, et bientôt à la tête d’une petite
fortune, je passais à un autre jeu. Mais sans le savoir, je faisais
ainsi de l’estampage.
Quand les archéologues
s’amusent
L’estampage est un procédé
encore utilisé de nos jours par les archéologues pour relever
grandeur nature et très précisément les inscriptions
et motifs gravés sur les monuments (par définition intransportables).
Cette technique, branche de l’archéologie que l’on nomme joliment
« épigraphie », permet d’effectuer une copie fidèle
et grandeur nature des inscriptions relevées sur les monuments,
tout en les préservant. On positionne un papier assez fin sur l’inscription
à reproduire et on passe doucement un crayon sur toute la feuille.
Les reliefs apparaissent alors en noir, tandis que les creux restent blancs.
La méthode est simple à mettre en œuvre et ne nécessite
aucun matériel compliqué ni spécifique, d’où
son succès. |
Technique d’estampage
Un petit croquis valant mieux qu’un
long discours… |
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Quelques 60 ans plus tard, j’ai
renouvelé l’expérience. En fouillant dans les tiroirs je
suis tombé sur de la vieille monnaie qui se prête particulièrement
bien à l’opération car assez grande et gravée sans
fioritures. En regardant autour de moi, j’ai également trouvé
d’autres sujets à estamper, dans le bon sens du terme, s’entend…
Venez donc visiter mon petit musée de l’estampage, traces éphémères,
reflets fragiles mais fidèles d’objets réels. |
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Voici la pièce de monnaie
mythique, celle avec laquelle, enfant, j’obtenais les résultats
les plus probants : la pièce de 5 Francs 1949. En aluminium
blanc, large et bien dessinée, c’est l’idéal pour de telles
empreintes… et pour les petites mains malhabiles. |
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Bien entendu, avec sa
plus grande taille et la finesse de sa gravure, le 50 Francs argent
de 1979 est une monnaie de collection qui convient bien à l’exercice,
surtout pour les enfants. Le problème, c’est de la récupérer
après estampage, sinon c’est vous qui seriez estampés…
Si vous craignez que votre collection
ne disparaisse peu à peu dans la tirelire du petit-fils, rabattez-vous
sur nos euros ordinaires, ça marche aussi. |
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Bon, mais la pratique de l’estampage
ne s’arrête pas aux monnaies. Bien d’autres supports sont praticables,
et là c’est l’imagination au pouvoir. Qu’on en juge ci-dessous. |
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Tapis en cordes tressées
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Papier peint gaufré
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Mur en ciment brut
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Les dessins pyrogravés
(gravure dans le bois à l’aide d’une pointe chauffée,
technique ayant déjà fait l’objet d’une rubrique par le passé
dans le n°114 de février 2011) font aussi parfaitement l’affaire.
Le trait, creusé dans la planche de bois, est reproduit, après
frottis, en blanc sur le papier. En utilisant plusieurs crayons de couleur,
l’estampage s’enrichit et devient plus artistique. |
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On l’aura compris : tout ce qui
présente des aspérités, des creux, des bosses, peut
être reproduit par frottis. |
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Il est possible de créer
ses propres "matrices" (objets permettant la reproduction par estampage),
simplement et au moindre coût : dessiner sur un carton épais,
puis repasser sur les traits, avec un stylo bille, en appuyant fortement
; ensuite, il suffit d’appliquer la technique du frottis que nous venons
de décrire.
C’est ainsi qu’ont été
reproduits la fleur de gauche et ci-contre ce personnage
de BD bien connu… |
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La prochaine fois que les petits-enfants
viendront passer le mercredi à la maison, vous saurez comment les
occuper, pas vrai ? Et vous vous réjouirez de les voir courir gaiment
avec leurs crayons de couleur partout dans la maison, écrivant sur
les murs, les rideaux… Charmants bambins…
Alors, à bientôt, pour
d’autres idées lumineuses comme celle-ci ! |
©
Guy Robert – Février 2016
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