En cette période de fin fêtes de fin d'année, les rues s'illuminent et les marchés de Noël rassemblent les amateurs de vin chaud. En Provence, il est une tradition supplémentaire : "Les Foires aux Santons". Mais qu'est-ce cette tradition et que sont ces santons ? I
– Origines du Santon
Cette tradition se répandit en Provence puis dans toute l'Europe. La Révolution Française ferma les églises et interdit toute représentation de la Nativité, qu'elle fût vivante ou non. Mais le petit peuple de France ne l'entendait pas de cette oreille : il y tenait, à sa crèche, et bientôt chaque famille installa la sienne, dans sa propre demeure. Bien entendu, pour des raisons de discrétion et de sécurité, pas question de mettre en scène les statues de bois habituelles, trop volumineuses, trop voyantes, et trop coûteuses. On modela donc les figures de la nativité, en petit format, avec de la mie de pain ! En cas de visite surprise de la police révolutionnaire, il était facile et rapide de dissimuler ces petits personnages interdits, quitte à les avaler tout rond… Plus tard l'argile, plus indigeste, allait remplacer la mie de pain : le Santon était né.
II – Les Santons de Provence "Santoun", en provençal, signifie "petit saint". Jean-Louis Lagnel est le premier des santons en argile, à Marseille, à la fin du XVIIIème siècle. Traditionnellement, les Santons de Provence rassemblent Marie, Joseph, l'Enfant Jésus, l'âne, le bœuf, l'archange, les Trois Rois Mages. Ça, c'est pour le noyau dur, à l'intérieur de la Crèche ou à l'extérieur proche. Ensuite, par cercles concentriques, se développe tout un paysage provençal, avec ses mas, ses murets de pierres sèches, ses ponts, ses moulins, ses villages perdus dans la montagne, ses champs de lavande ou ses vignes. Car au fil des années d'autres personnages provençaux se sont invités à la fête. "Li pastre" (les bergers) ; "lou viei et la vièlo"(le vieux et la vieille, Grasset le vieux avec son parapluie et Grassette la vieille avec son panier) ; "lou ravi" (le ravi, celui qui lève les bras au ciel). Et tous les autres santons représentant, dans un hommage général, les petits métiers et les petites gens : le pêcheur, la poissonnière, le bûcheron, le meunier et son sac de farine, le vannier, le rémouleur, le tambourinaire. On y retrouve tout ce qui fait le folklore méditerranéen : la pétanque, la partie de cartes…
III – La fabrication des Santons Contrairement à ce qu'on pourrait croire, il n'y a pas d'industrialisation du processus de fabrication. Quelques grandes entreprises (souvent familiales) fonctionnent dans ce créneau, mettant en œuvre des méthodes artisanales et traditionnelles. La fabrication d'un santon simple (c'est-à-dire moulé d'une seule pièce) nécessite 6 étapes. 1 – Le modelage
2 – La création
du moule
3 – Le moulage (ou estampage)
Un moule peut produire, sans trop s'user, une centaine de santons. Les professionnels confectionnent généralement 2 moules : un "moule d'usage" consacré aux tirages des exemplaires et un "moule mère" qui produira une nouvelle figurine, laquelle servira à couler un moule tout neuf pour l'estampage d'une nouvelle série. Astucieux ! C'est cette bibliothèque de moules, soigneusement conservés, étiquetés, classés, qui fait toute la richesse de l'entreprise.
4 – L'ébarbage
et le lissage
5 – La cuisson du santon Le santon, bien séché, est
placé dans un four spécial, à 500° d'abord, puis
à 900° ensuite. Il y reste ainsi une douzaine d'heures puis,
à l'extinction du four, se refroidit lentement.
6 – La peinture du santon Pour peindre les santons, on utilise généralement de la peinture acrylique matte, peinture qui résiste bien dans le temps. On peint un santon de haut vers le bas. On commence donc par la tête pour terminer par les pieds. Les grands santons articulés et habillés présentent les détails les plus fins et nécessitent de ce fait un travail plus complexe, avec parfois, comme pour le rendu du regard par exemple, 6 passages de pinceaux successifs. Heureusement, le santonnier travaille toujours par série, afin de gagner en productivité et de permettre à la peinture de sécher entre 2 couches.
Les santons de grande taille demande un
travail supplémentaire : l'habillage. Les vêtements sont découpés
dans du tissu provençal traditionnel, à partir d'anciens
patrons de costumes folkloriques.
IV – Les Foires aux Santons Outre les crèches monumentales qui sont exposées ici ou là reconstituant, avec minutie et réalisme, villages et paysages provençaux, chaque année, de novembre à décembre, se tiennent un peu partout des "Foires aux Santons".
Photos de Claudine et Guy Robert – Texte de Guy Robert
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