Février 2013
Les autres N°


CONSTRUIRE LA LICORNE (III)

C'est en parcourant la brocante du Vieux Marché, à Bruxelles, que Tintin découvre une maquette de La Licorne et qu'il décide de l'acheter pour en faire cadeau au capitaine Haddock. Ce geste d'amitié est le point de départ d'une grande et mystérieuse chasse au trésor.

C'est également à une véritable course au trésor que nous nous livrons, depuis quelques mois, poursuivant la construction de la maquette "La Licorne". Dans les numéros précédents, nous étions parvenus à l'étape 42 (sur les 125 prévues). Voici donc un point actualisé sur ce chantier titanesque (si on ose dire cela pour un bateau !...)

Un vaisseau bien armé
 

Une fois la coque complètement bordée, ce qui a pris quelques jours, on est passé à l'armement du navire : 

Montage et peinture des 52 canons qui arment ce vaisseau de 3ème rang de la flotte de Louis XIV.

A l'époque les canons étaient en bronze et les affûts en bois. Du côté de la culasse (arrière du canon sur la photo), le métal avait une épaisseur de 3 fois le diamètre du boulet. Enfin, la boule terminant la culasse (à gauche sur la photo) recevait une corde destinée à limiter le recul de la pièce lors du tir.

Pour la maquette, les canons des ponts extérieurs sont montés sur affût visible.

Pour l'instant, les ouvertures qui s'ouvrent sur le pont (très dangereuses pour les matelots, j'en conviens !) sont bien entendu provisoires. Le trou rond, par exemple, recevra plus tard le grand mât. Mais ceci est une autre histoire...

Les autres canons sont "tronqués" et dans ce cas seule la bouche passe par le travers des sabords.

A cette vue saisissante, nombre de pirates ont cru leur dernière heure arrivée.

En attendant l'installation définitive et des jours meilleurs, on remise pacifiquement ces superbes pièces d'artillerie.


 

Un chantier tout azimut

Les travaux qui suivent peuvent sembler décousus, mais on suit strictement le guide de montage, ce qui fait que sur le chantier, les ouvriers passent du coq à l'âne.
 
 

Par exemple, après les canons, on a prépare la façade du château arrière, ce qui nécessite le collage de 18 pièces différentes. Cette décoration recouvrira la dunette arrière. On appréciera le réalisme de la maquette par rapport à l'album d'Hergé, comme montré ci-dessus. Il manque encore les balcons, qui seront construits plus tard. A voir un tel luxe, il est facile de comprendre que c'est ici, à la poupe du navire, qu'étaient installés les appartements du capitaine et de son second.
 

Ensuite, c'est la corvée de ponçage et de peinture de la coque :

3 couches de blanc jusqu'à la ligne de flottaison. A l'époque (18ème siècle), cette peinture protégeait la carène des tarets (vers marins qui attaquent le bois) et des coquillages.
 

Retour sur le navire, où les escaliers reliant les différents ponts sont peints et installés provisoirement.

On imagine déjà les matelots manoeuvrant sur les ponts et se préparant au combat, tandis que les ordres fusent et qu'au loin grondent les canons de l'escadre ennemie. 

Mais pour l'instant, tout est encore calme dans l'odeur de la peinture fraîche. Car comme le dit un vieux dicton : "Dans la Marine, on salue tout ce qui bouge et on peint tout le reste."
 

 

Les derniers numéros de cette 3ème étape concernent la construction des mâts (artimon, grand mât et mât de misaine). Comme dans la réalité, les mâts, contrairement à une idée reçue, ne sont pas faits d'une seule pièce. En effet aucune arbre ne serait assez grand et assez droit pour qu'on puisse y tailler des mâts de plus de 40m de haut.
 
Ainsi, par exemple, le grand mât est constitué de quatre éléments, fixés les uns au-dessu des autres. Mais à ce stade, on ne s'occupe encore que de la fabrication des différentes parties. Opération délicate qui nécessite la sculpture de baguettes de bois rondes très fines. 
En outre, chaque bas de mât (la partie la plus basse des mâts) reçoit des "ferrures" qui, maquettisme oblige, sont réalisées en ficelle fine (10 tours pour chaque ligature !), à coller très soigneusement, sil vous plait (voir photo de droite)

Voilà où on en est arrivé, au 63ème numéro. Comme le montre la photo finale ci-dessous, les éléments des mâts sont prêts mais ne seront arrimés au navire que bien plus tard. Patience, patience..., mais n'est-ce pas ce que demande en premier lieu une telle maquette et ce qui en fait l'agrément ?





Un peu de culture maritime

Tout le monde connaît l'exclamation favorite du capitaine Haddock : "Mille millions de mille sabords !" Mais qu'est-ce qu'un sabord, mille sabords ?!
 
Comme on le voit ci-contre, un sabord est une ouverture dans la coque du bateau, comme une petite fenêtre, au travers de laquelle on avance la bouche du canon, afin de bombarder l'ennemi. Sur la Licorne, il y a 25 sabords de chaque côté, répartis en 3 lignes. Quand le navire n'était pas au combat, on reculait les canons et on fermait les sabords à l'aide d'un panneau (le "mantelet") afin d'éviter d'embarquer de l'eau par ces ouvertures en cas de gros temps. C'est de cet accident (regrettable) que vient l'expression "saborder" : c'est laisser entrer l'eau par les sabords (ou par un trou dans la coque) jusqu'à faire couler le navire. Mais nous éviterons à La Licorne de connaître sort si funeste !

Arrivés au 63ème numéro, nous voilà tout juste à la moitié de cette construction qui en comprend 125. Et pour les connaisseurs, ces nombres sont parlants. En effet, chacun des albums d'Hergé comporte 62 pages. La construction de la maquette "La Licorne" s'étend donc, à une unité près, sur autant de numéros qu'il y a de pages aux deux aventures qui la mettent en scène. Etonnant non ?

Bon j'y retourne, car le Trésor de Rackam Le Rouge n'est plus loin maintenant… Un peu plus à l'Ouest, sans doute ! 
 
 

© Guy Robert - février 2013
Et bien entendu, toujours en ligne, les précédentes étapes de ce chantier naval :
Construire La Licorne (I) : du n° 1 au n° 19 (mars 2012)
Construire La Licorne (II) : du n° 20 au n° 42 (septembre 2012)